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les femmes qui tombent

clientes. Vous marcherez, lentement, avec art, et… c’est tout.

Elle murmura :

— Je n’oserai pas.

— Allons donc ! vous verrez que cela vous amusera bientôt de voir passer sur vos épaules toutes les fantaisies luxueuses de la mode. Et puis on vous habillera aux frais du magasin, d’une belle robe de satin ou de velours ; vous serez nourrie et payée cent francs par mois.

— Oh ! c’est beaucoup, dit-elle, joignant naïvement les mains.

Il rit bonnement de la voir émerveillée.

— Alors, vous voulez bien que je m’occupe de vous caser là dedans ?

— Je vous en prie, monsieur. Mais vous êtes trop bon, je vous serai reconnaissante toute ma vie…

— Donnez-moi votre adresse. Bien. Voici la mienne.

Elle lut sur le carton qu’il lui remit :

« Aristide Beauséjour, commissionnaire en marchandises, rue de Provence. »

— Je vous écrirai, lui dit-il.

Et il s’éloigna, après l’avoir saluée très bas.

— Enfin, dit-elle en s’envolant toute légère, le cœur empli de joie, enfin, il y a encore des honnêtes gens de par le monde ! Quel bonheur ! Je vais pouvoir vivre tranquille en travaillant. Cent francs !