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les femmes qui tombent

Madame Le Boterf tourna vers elle ses yeux subitement allumés :

— Serait-ce une indiscrétion de vous demander… ?

— Son nom ? Tout le monde le sait : c’est le baron de Monthaut.

— Ah !…

Yvonne se recueillit une minute. Un émoi passait sur ses traits. Ses lèvres s’amincissaient davantage. L’œil se plissait sournois et dur.

Elle reprit tout à coup :

— C’est pour cela que vous désirez parler à M. Abel Henriet ?

— Oui, madame.

La chanteuse baissa la voix :

— Mais c’est encore un fichu animal, celui-là. Il se conduit comme un rien du tout avec les femmes. Celles qui ont besoin de lui, savent comment il se paye. S’il vous rendait service encore ! Mais, dès qu’on a tourné le chignon, il n’y pense plus.

Et il faut venir cent fois pour qu’il vous oblige une. C’est une sale corvée.

— Il y a d’autres agences…, commença madame Le Boterf.

— Ah ouiche ! c’est partout la même boutique. J’ai roulé dans toutes ces boîtes, moi, avant d’avoir une situation, et je sais de quoi il retourne.

— Alors, vous croyez que toutes les femmes qui viennent ici… ?