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— Elle me croit séparée de mon mari.

— Quand cela serait ?

— Mais cela n’est pas. Ah ! tenez, parlons d’autres choses, voulez-vous ? Parlons de vous.

— Vous voulez bien vous intéresser à moi ? Mais vous me rendez trop heureux !… Pourquoi, après cette bonne parole, me refusez-vous votre main ?

Sylvére, empourprée :

— Vous l’avez déjà baisée deux ou trois fois, si je ne me trompe.

— Ah ! si vous passez votre temps à tenir des comptes pendant que je parle ! Eh bien, comptons, soit. Savez-vous que depuis que je suis votre ami…

— Il y a trois mois !

— Il y a toujours, madame. Depuis cette éternité, veux-je dire, ne devrais-je pas avoir le droit de vous embrasser, tranquillement, affectueusement sur ces beaux cheveux, et même sur cette joue qui rougit de colère en ce moment.

— Non, mon ami, ce n’est pas de la colère, c’est…

— Achevez.

— De la tristesse, si vous voulez.

— Ah ! Sylvère, si vous aviez pour moi un peu de cette immense tendresse que j’ai pour vous, ce n’est pas de la tristesse que vous ressentiriez, c’est de la joie, du bonheur. Mais, rien, rien, aucune amitié…

— Si, mon ami, de l’amitié, beaucoup, je vous jure. Mais…

— Rien que de l’amitié, vous voulez dire, aujourd’hui, et demain, toujours ! N’est-ce pas ?…

Sylvère prête à pleurer :

— Mais c’est très doux, très bon, c’est ce qu’il y a de meilleur au monde, l’amitié ! Ah ! Dieu, si les hommes voulaient !…