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de savoir. Est-ce une femme du monde, une actrice, une drôlesse ? Dis vite. Tu vois, je suis admirablement calme. Tu peux avouer. Cela ne tire pas à conséquence, ces petites farces-là ! D’ailleurs, dans les termes où nous sommes, cela s’explique, presque. Tu vois, je pardonne d’avance. J’en ris, même !… on n’est pas plus dans le train… Seulement !…

— Mais, ma pauvre Sylvère, tu ne sais donc rien ! Il ne t’a pas dit ?…

— Quoi ? Je sais que je l’attendais, hier soir, et qu’il n’est pas venu.

— Mais il t’a écrit ?

— Oui ; un mot que je ne comprends pas. Ce qu’il y a d’un peu clair, c’est qu’il me prie de l’oublier.

— Hélas !

— Cette petite plaisanterie doit cacher quelque sotte histoire, sans importance au fond. Car M. Paul Ruper est un honnête homme, je crois. Or, nous avons échangé notre parole, ici, chez toi, de nous attendre, et de nous appartenir un jour. Moi, je lui ai gardé ma foi, scrupuleusement et malgré… tout. Lui de même, je veux le croire. Alors que signifie le billet lamentable de ce matin ? Est-ce un dépit d’amoureux, ou une fredaine. C’est ce que je veux savoir.

— Sylvère, t’es-tu demandé jamais si homme qui s’engageait par serment à appartenir fidèlement à une femme pouvait s’engager aussi à l’aimer toujours ?

— Veux-tu me faire entendre que Paul s’est lassé de m’aimer, qu’il ne m’aime plus ?… cela serait cruel ; mais enfin ! Il est possible que la durée d’une telle situation ait diminué l’ardeur de ses sentiments. Qu’il soit moins amoureux, je l’admets. Toutefois, il ne peut avoir cessé de m’aimer de cette tendresse paisible que l’on a pour sa fiancée ; et j’ai assez d’audace