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Et elle chassait d’autour de son front, d’un geste continu, ces idées lancinantes, en fuyant d’une pièce à l’autre, et s’effrayant encore du bruit spectral de sa robe traînée.

A tourner sans répit, elle se donnait le vertige ; et puis ce va-et-vient, berceur, peu à peu engourdit ses pensées ; son inquiétude s’atténua.

Quelquefois, ainsi, l’on se fait des chimères, et l’on souffre pour un malheur qui n’a jamais existé. Sans doute, tout s’expliquerait demain. A moins que, cette nuit encore, à l’issue de quelque réunion tardive… Car, et son espérance se réveillait, Paul ne lui avait rien écrit. Ah ! comme elle avait souffert ! Elle ne l’oublierait jamais !

Et déjà, presque, elle l’oubliait.

Tout à coup, elle courut à la porte : si, tandis qu’elle errait follement à travers les chambres, une voiture s’était arrêtée sans qu’elle l’eût entendue ? Peut-être, en ce moment, dans l’escalier plein d’ombre, il montait. Elle écouta, l’oreille collée, mais son cœur battait si lourdement qu’il l’assourdissait.

Alors, elle revint, prit sa lampe et retourna vers le seuil. Cette fois, elle ouvrit, s’avança sur le palier, s’obstinant à l’illusion qu’elle eût entendu craquer les marches, en bas. Et, la lumière haute, elle se penchait, retenant son souffle, prête à crier de joie si Paul eût enfin paru.

A regret, elle rentra ; mais plusieurs fois elle revint, obstinée à ce fragile espoir qui donnait à ses nerfs quelques minutes d’apaisement.

La nuit coulait.

Sylvère, de plus en plus morne, cessa d’écouter.

Cependant, comme si elle n’avait pu se résoudre à abandonner l’espoir de la fête nuptiale pour laquelle