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Le printemps finissait ; juin chauffait l’atmosphère, grouillante du parfum des sèves, à la fois âcre et molle et dans laquelle on respirait, avec les pollens épars, des senteurs d’herbes mûries, de fruits lointains, de fleurs fécondées.

Les sensitifs buvaient, à même l’air, l’impérieuse suggestion des actes générateurs. Sur les quais, les moineaux, les chiens et les voyous poursuivaient leurs femelles ; les bois étaient remplis de couples enlacés ; le soir on se buttait aux couches nuptiales.

Sylvère demeurait enfermée. Mais au-dessus de son balcon nichaient des hirondelles.

Paul n’avait pas reparu. Vers la fin du deuxième jour on sonna. Sylvère fut obligée de se tenir au mur pour aller ouvrir. C’était une dépêche. Lui, sans doute ; il s’annonçait. Elle regarda l’écriture, et un blasphème faillit toucher ses lèvres. Non ! pas lui, l’autre ! Elle lut :

« Comment trouvez-vous celle-là, hein ? Vais mieux. Parole d’honneur… Les docteurs en ont la jaunisse. Je les épate. Il me semble avoir déposé la calotte de plomb qui me gênait… Il est vrai que je sens la fièvre, et ça clapote là-dedans, ça clapote… mon araignée qui se noie… Rien farce !… J’ai voulu sortir… ces salauds m’ont enfermé. Mais je leur échapperai, va !… Vive Baringer !… que disais-je ? Primo, il me faut une veste, la mienne manque de chic. Et je vous trouve avare de monnaie… Les femmes ça se paie… Oh ! les garces ! J’ai envie de te prendre, à la chapelle, dans la niche, nous allumerons des cierges… Tu veux ? Silence donc, là-haut, cloportes !… ce que ça cogne dans ma boîte. Nom de… ils vont faire un trou… Apporte des sous pour que je file, nous rirons !

Jules Maurine. »