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vous rencontrer à la prochaine réception de Mme de Z…

— Je vous remercie, monsieur, mais je suis en deuil…

— Ma chère, interrompit Alix, véhémente, vous serez reçue en robe de deuil, s’il vous convient de n’en pas mettre une autre. Vous avez le droit d’artiste d’habiller comme il vous plaît votre adorable petite personne ; mais vous avez aussi le devoir de vous montrer là où il faut qu’on vous voie, vous comprenez ?

Sylvère se prit à réfléchir, la tête inclinée, et n’aperçut pas le regard triomphant qui s’échangeait.

D’ailleurs, la conversation se brouilla en plaisanteries aimables. Baringer soutenait mal son rôle d’affamé, et se hâtait de renvoyer son assiette, plus occupé des menus gestes de Sylvère grapillant des fruits et mordillant des dragées que de ce qu’on lui servait.

Et cette bonne Alix le sermonnait, lui criant : casse-cou, et comme il perdait bien son temps, et qu’elle allait le mettre à la porte.

Lui se défendait, gauchement, avec des airs sournois et des soupirs étouffés.

Sylvère, très rouge, commençait à s’impatienter. On quitta la table pour le petit salon intime où le café était servi.

Le colonel brûla ses cigarettes, comme un encens, tout près de Sylvère, qui avait refusé de fumer le tabac blond avec lequel on l’avait tentée, encore que Baringer l’en eût suppliée comme d’une faveur. Et il se plaisait à l’ennuager, avec des câlineries d’adorations ferventes, des tentatives respectueuses de baise-mains dont elle s’énervait.

Tout à coup, Alix disparut ; une dépêche à écrire qu’elle avait oubliée. Et Baringer tomba sur ses genoux, murmurant à Sylvère des paroles brûlantes.