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Et vous vous faites du mal pour rien qui vaille ! Ah ! j’en ai vu bien d’autres, moi !… Parlons de choses plus intéressantes, voulez-vous, ma mignonne ?

Sylvère murmura très doucement :

— Je comprends que l’on tue parfois !

Alix Deschamps la regarda avec stupeur, puis elle s’écria :

— Tuer, pour cela ? Oh ! la vie serait trop dramatique si toutes les femmes calomniées le prenaient sur ce ton

— Mais si, mais si, insista tranquillement Mme du Parclet. On se défend comme on peut. Ainsi de Labut serait là, dans ce moment, j’ai ici un petit revolver, oui, ce bijou, là, sur ma table ; je le viserais au cœur, comme dans une cible, sans plus d’émoi.

— Si le colonel vous entendait ! exclama cette toquée d’Alix, enthousiasmée par le beau sang-froid de Sylvère. Il adore les héroïnes, ce héros. Vous seriez parfaite dans le rôle. Je vous vois d’ici, avec vos longs cheveux dénoués, l’air tragique, superbe !… Tenez, je vous ferai des vers, oui, la véhémente apostrophe d’une révoltée qui menace, qui va tuer, et… il faudrait une chute… attendez, je la tiens !

. . . . . . . . . . . . . . .


Blessée, elle pâlit, et se dressant soudain,
Braqua vers ce cœur lâche une arme imaginaire,
Mais pour donner la mort il faut un cœur d’airain.
Et, pleurante déjà du mal qu’elle allait faire,
Laissa tomber les fleurs que brandissait sa main.
Etc…

– Ça ne vaut rien ; mais il y a l’idée, vous verrez ; je vous enverrai cela pour vous distraire.

— Merci, répondit Sylvère qui n’avait pu s’empêcher de sourire. Cette Alix était déconcertante avec sa vision des choses.