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ment vos belles épaules trop voilées, en vous cachant à demi derrière votre éventail, car un peu de votre gorge était nue et cela vous irritait quand nous y portions nos regards. Êtes-vous bien certaine que ce n’est pas de cet orgueil-là dont votre Dieu vous a punie ?

— Vous aurez beau chanter, mon poétique ami, vous n’arriverez pas à me faire mépriser Dieu, j’aimerais mieux le nier. Non, je n’ai pas d’orgueil ; mais j’ai de l’horreur pour les matérialités de la vie : ce n’est pas la même chose.

José reprit en souriant :

— Nourrissez-vous alors de feuilles de roses !

— Ou bien adorez un poète, n’est-ce pas ?

— Pourquoi pas ?

— Le malheur, c’est que mon pauvre Paul n’a aucune poésie dans l’esprit.

— Pourquoi l’avez-vous choisi ?

— Mais…, je ne l’ai pas choisi, répondit naïvement Sylvère.

— Parfait. De mieux en mieux. Alors si vous l’épousez, vous ferez tout bourgeoisement un mariage de convenance ? Fi…

— Mais non, mais non, je vous assure que je l’aime.

— Tant que ça ?

— Beaucoup.

— Je voudrais bien vous poser une question.

— Je vous le permets. Cela me fait tant de bien de causer sincèrement avec vous. Je crois qu’il n’y a que vous qui ayez vu le fond de mon cœur.

— Comme les Hébreux avaient entrevu, de loin, la terre promise ; mais ils n’y entrèrent jamais.

— A la question.

— Elle me gêne.

— Cela veut dire qu’elle va m’embarrasser.