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je ne sais plus où je vais, ce que je veux, ce que je dirais si…

Et alors je rêve à Paul, à une existence enfin complète, avec lui ! Ah ! si tu savais comme mes bras me semblent lourds, parfois, à être toujours vides, et comme je suis tentée de les jeter au cou de Paul, et moi avec, de tout mon poids, comme on se jette à l’eau !…

— Eh bien ?… commença Mme de Bléry.

Puis elle se tut.

— Oh ! mais, rassure-toi, reprit Sylvère, dont la pâleur ardente s’effaça dans une rougeur de confusion. Je ne ferai pas de bêtises. Je me garde. Et d’ailleurs, je le voudrais que je ne le pourrais pas. Non vrai ! Je ne sais pas comment je suis faite, mais j’éprouve avec de réelles tentations pourtant, une si parfaite horreur de ces… choses ; j’ai conservé, de leur initiation, un si odieux souvenir, que j’ai vraiment peur d’être une femme détestable pour Paul. Je ne saurai pas me donner : je ne sais que me défendre…

— Tu as dit le mot, reprit gravement Mme de Bléry, « savoir se donner ». Tout le bonheur de la femme tient dans cette science-là ! Ah ! ma pauvre Sylvère !

— Bah ! répliqua gaiement Mme du Parclet, s’abandonnant à une petite débauche de mots qui ne lui était pas familière, ce que les femmes ne savent pas donner, les hommes savent bien le prendre.

— Pas toujours, tu vois, puisque Paul !…

— Mais nous ne sommes pas encore mariés !

— Et c’est bien le malheur !

— Quel malheur ? Crains-tu qu’il ne perde patience ?

— Et si cela arrivait ?

— Oh ! tu calomnies Paul, et moi-même. Pourquoi veux-tu qu’il soit moins amoureux et fidèle que le