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vives, si aiguës, qu’il me semble parfois que mon esprit a des sens.

En revanche, le matériel me glace. Je n’arrive pas à comprendre la possibilité des pâmoisons amoureuses dans le détail choquant et presque grotesque qui les provoque et qui les suit. Tenez, les seules amours qui me charment, ce sont celles qu’on nous montre au théâtre, dans le décor. Ah ! le décor, mon ami ! Tout est là ! Dans la poursuite de l’illusion, de l’au-delà, du rêve !

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O mer, ô charmeuse, ô magicienne par qui mes rêves s’éploient et s’engourdissent mes douleurs !

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Une mer calme, moirée, platement étendue, jusqu’à l’horizon lointain marqué d’une ligne droite, sous le ciel qui la touche, uni comme elle, est un spectacle morne et qui endort.

Et ce calme revêt cependant une grandeur troublante, quand le regard peut embrasser une immense coulée, un vaste lambeau de mer, immobile et bleu ainsi qu’un ciel tombé, et cela dans le grand silence des nues, comme, par exemple, du haut d’une falaise très haute, à pic sur cette immensité.

Là, seulement, on peut ressentir, autant qu’il est donné à nos sens de le percevoir, la sensation de l’infini.

On conçoit la notion de l’âme errante dans l’espace. Un besoin de planer vous emporte. Un désir inconscient vous fait tendre les bras, comme si l’on ouvrait des ailes pour prendre un essor calme dans cette solitude infinie où règne l’éternelle paix.