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Louise avait du chagrin, plus qu’elle n’en montrait, plus qu’elle ne l’eût avoué ; elle aimait Sylvàre, elle aimait Paul, et elle pressentait un lendemain douloureux, auquel elle ne pouvait rien, devant laisser s’accomplir les logiques et obscures destinées.

Paul recommençait :

— Vous nous écrirez tout de suite ?

Et l’heure avançait. La bousculade des voyageurs les heurtait ; mais ils reprenaient leur attitude, l’un près de l’autre, les mains serrées, le regard noyé, avec des silences.

La cloche sonna :

— Allons, dit Louise, monte, installe-toi, tâche de dormir…

— Au mois de septembre alors ? murmura Sylvère.

— Tu embrasseras Lili… de ma part, reprit vivement Louise.

— Et de la mienne, continua Paul. La chère petite !

Sylvère n’osa pas pleurer.

Elle se jeta dans les bras de Louise qui frissonna, sentant trembler tout le corps de la pauvre femme. Par-dessus la tête inclinée de Sylvère, elle regarda Paul, presque durement, avec un mouvement de ses lèvres.

Et Paul, prenant Sylvère aux épaules, la détacha de Louise et l’appuya sur sa poitrine en lui baisant tendrement les cheveux.

Sylvère balbutiait :

— Vous ne m’oublierez pas ?

— Jamais !

Puis, tout bas, il reprit :

— Et… si vous voulez… m’aimer, appelez-moi, j’irai vous retrouver là-bas !… Nous serions si heureux ! Le voulez-vous, Sylvère ?