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rence de santé un peu campagnarde, si fraîche et comme fleurant l’air embaumé des landes fleuries, avait disparu. Une coulée de fièvre demeurait sous ses yeux battus, sous sa peau chaude d’une pâleur de morbidesse et d’énervement. Paris avait donné son coup de dent meurtrier à la robuste et saine plante sauvage qui, maintenant, s’étiolait.

Et Louise la renvoyait aux champs, au vert, passer l’été, boire de la brise de mer.

Paul aussi insistait pour ce départ, très affectueux, mais tranquille. Et tous les trois, en ce moment, unis dans une tendresse calme, éprouvaient la même douce mélancolie à l’approche de cette séparation qui devait durer plusieurs mois.

Un serrement de cœur, plus triste, oppressait Sylvère ; mais elle le dissimulait, voulant paraître aussi vaillante que Paul. Toutefois, elle le regardait fréquemment, avec une interrogation muette, inquiète, dans ses yeux mouillés. Mais il lui souriait, tendrement, l’exhortait, la conseillait ; et elle se laissait renvoyer, n’osant pas trop se plaindre, d’ailleurs : n’allait-elle pas retrouver sa fille, sa chère petite Lili qui l’appelait si ardemment ? Elle aurait eu honte de pleurer ; et cependant, elle sentait venir les larmes.

— Tu nous écriras ? répétait Louise, à cette dernière minute, où l’on ne trouve plus une parole, où l’on voudrait dire des choses, lesquelles demeurent confuses, ne se précisent pas ; et l’on cherche à se les rappeler dans cette anxieuse sensation du temps qui passe, de l’heure qui fuit. On souffre tant que l’on souhaite presque que cela s’achève, que le train soit loin. C’est comme l’agonie plus douloureuse que la mort ; et on songe à la délivrance dans l’irrémédiable.