Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/224

Cette page n’a pas encore été corrigée

ment que José de Meyrac, plus qu’un autre, est capable de t’aimer pour l’amour de l’art, sans désir, sans une espérance plus ou moins lointaine ?

— J’en suis sûre : je lui ai tout avoué.

— Tout quoi ?

— Eh bien, mais, mon engagement avec Paul !

— Lui as-tu dit que tu aimais Paul ?

— Certes !

— Et il continue à t’enguirlander, à brûler, comme un encens, toute sa poésie à tes genoux, à te bercer dans les tristesses languides de ses très respectueux regrets, et tu ne t’aperçois pas, naïve ?…

— De quoi donc ?

— Mais, qu’il espère plus que jamais, ma très chère ! Où prends-tu qu’un homme, du caractère et du tempérament de Meyrac, soit capable de perdre son temps auprès d’une femme de laquelle il n’attend rien, ni dans le présent, ni dans l’avenir ?

— N’est-ce rien, qu’une amitié comme la nôtre ?

— Tiens, tu es adorable ! Et je comprends que tu fasses tourner la tête aux hommes qui t’approchent. Tu appartiens à cette catégorie d’enjôleuses que j’ai vu fort exactement étudiées quelque part, à peu près de la façon que voici : « Des femmes très pures, il se dégage comme une attirance d’amour. L’inconscience de leurs mouvements, de leurs attitudes, les rend follement dangereuses, car elles rappellent, étant femmes, toute l’innocente candeur de l’enfant. Elles troublent par la clarté, la naïveté de leur rire ; elles pleurent comme un bébé que l’on gronde ; elles ouvrent tout grands leurs yeux naïfs avec l’étonnement serein de l’enfantelet à qui l’on conte une histoire. Elles ont des gamineries de gestes vifs, des envolées subites, des câlineries mignardes de leur tête