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— Le lui avez-vous demandé ?

Elle répondit trop rapidement :

— Non.

— Eh bien ! si cela vous répugne, que ne chargez-vous un ami de négocier cette délicate affaire ? Je m’offre à vous.

— Merci. Je vous l’ai écrit ; mon mari est malade. Il serait bien plus cruel encore de lui adresser une pareille requête que d’attendre tranquillement qu’il plaise à Dieu de rompre nos chaînes.

— Malade ? répéta de Meyrac préoccupé. Qui le soigne ?

— Sa famille, là-bas… balbutia Sylvère.

— C’est bien étrange.

Elle se redressa :

— Pourquoi ?

— Parce que… je ne comprends pas. Vous êtes bonne, dévouée, avec un sentiment profond du devoir vous avouez que les torts de votre mari envers vous ne sont pas… graves, et vous le laissez ainsi… Je vous demande pardon, mais il y a là une pensée qui me gêne, dans mon admiration passionnée pour vous.

Je vous préférerais franchement révoltée, dure, résolue à vous faire du bonheur coûte que coûte, même aux dépens de celui que vous n’aimez pas, là-bas !… plutôt que de vous voir ainsi, douloureuse et résignée, chaste, et… manquant au plus élémentaire des devoirs, aux soins que vous devez à l’homme qui fut et qui est encore votre mari.

— Ne me blâmez pas, ne me jugez pas, murmura Sylvère d’une voix altérée, croyez seulement que je suis encore plus à plaindre que je ne puis et ne veux le dire.

— Je vous crois, mon amie, et pardonnez-moi. Je