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Elle franchement heureuse, tranquille, ses grands yeux bien ouverts ; lui, encore sérieux, avec une vague tristesse, un regret sur sa bouche qui frémissait d’un obscur désir de baiser. Mais il se contenta de serrer les doigts confiants qui s’abandonnaient à son étreinte. Et, chaleureusement :

— Eh bien, mon amie, la vie vous est-elle plus douce que la dernière fois où je vous ai vue, il y a longtemps !

— Presque une année ! dit-elle d’un ton de reproche.

— Chut ! Ce délai m’était indispensable pour certaine cure…

Elle rougit. Il ajouta très vite :

— Et même, j’aurais attendu encore, mais je voulais vous apprendre une grande nouvelle…

— Ah !… Laquelle ?

— Cherchez.

Elle, avec un cri :

— Vous vous mariez !

— Non, pas encore. J’apporterais à ma femme trop peu de mon cœur.

— Alors, je ne devine pas : dites vite.

— Vous rappelez-vous, quand nous causions, si cordialement, autrefois — car il y a déjà un autrefois entre nous — je vous parlais de mes travaux, de mon but, de mes espérances…

— J’y suis : vous vous présentez à la députation.

— Pas encore, mais vous brûlez, car la détermination que je viens de prendre est un acheminement. Enfin, voilà ; notre journal ne pouvant plus tenir, allait être vendu ; je l’ai acheté.

— Alors, vous voici grand maître à votre tour ? Tous mes compliments, mon cher directeur, je suis bien heureuse.