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à le faire se mouvoir. Des gouttes de sueur filèrent de mes tempes au long de mon voile, comme si ma chair, plus faible que mes yeux, pleurait.

Enfin, le battant céda, avec un grincement semblable à une plainte. Mes paupières tombèrent, se voulant fermer. Je résistai ; et par un effort de volonté héroïque, mes regards se levèrent : la chambre était vide, rangée et fleurait le santal.

J’éprouvai un découragement ; il me fallait poursuivre ma lugubre recherche, et je sentais mes nerfs, entrés en vibration, accélérer mon souffle, et les battements de mon cœur devenir rapides et fous. Cela me présageait une crise nerveuse à brève échéance.

Alors, avant de succomber, je voulus en finir avec ce doute angoissant, plus douloureux peut-être que la certitude d’une réalité irréparable, et je m’élançai, de toutes mes forces, à travers l’appartement ; il m’était assez connu pour que je pusse me diriger.

J’arrivai ainsi dans le petit salon familier où se tenait habituellement Louise. Des fleurs, fraîchement coupées, traînaient sur une table ; leur vue me donna le frisson : n’étaient-elles point préparées pour la funèbre jonchée d’un lit de parade, l’embaumement violent d’une chapelle ardente ?

Les jacinthes, les tubéreuses, les héliotropes blancs évoquèrent la chaude odeur des cires fondues, mêlée aux senteurs mortes des roses fanées autour d’un corps lentement refroidi.

— Allons, me dis-je, les dents serrées, je ne me trompais pas, il est ici, dans le salon évidemment, sur quelque estrade déjà préparée, tendue de velours noir, environnée de lampadaires.

Du courage, entrons !

Ce n’était déjà plus moi qui marchais. La pensée