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— Mais, ajouta la princesse, j’ai gardé les danseuses qui sont venues effeuiller des roses autour de la table pendant le dîner, et on va nous danser un pas… très suggestif. Si vous voulez venir ?…

Elle fit un signe et tout le monde, sans bruit, se dirigea vers une portière entièrement abaissée, et sous laquelle, un à un, on se coula.

La pièce où l’on entrait, étroite et longue, n’était éclairée que par une lanterne turque suspendue au plafond. Un divan garnissait tout un côté, divan très mou dans lequel on enfonçait.

J’allai jusqu’à l’extrémité, un peu inquiète de mon voisinage dans cette demi-obscurité.

Debout, au milieu d’un tapis d’Orient, la L…, cette belle danseuse d’Excelsior, se tenait lascivement cambrée, presque nue me parut-il, sous une gaze noire semée de paillettes d’or, les cheveux défaits, les seins soutenus, mais non voilés ; et, lentement, elle se mit à danser, moins des pieds que des hanches, des reins et du ventre, du ventre surtout, étrangement souligné, une sorte de danse d’almée, accompagnée par une musique barbare qui ronflait sous les doigts de quatre négrillons accroupis.

On fit recommencer deux fois cette scène trop orientale. Alors, tout à coup, la princesse, assise près de moi, se penche et me dit, très naturellement :

— Regardez donc comme ça les allume, tous ces vieux-là !… Hein ? En font-ils des yeux !…

Machinalement, et bien qu’étourdie comme si je venais de tomber d’un toit, je tournai un peu la tête, et regardai « ces vieux ».

Tous les yeux braisillaient à éclairer la chambre et toutes les joues flambaient comme passées au fard.

Mais l’un de ces visages surtout luisait, celui de mon