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gatienne

pas assez souffert depuis deux mois que tu me fuis ? J’ai respecté tes premières hontes d’enfant ; mais maintenant c’est fini, n’est-ce pas ?…

— Allez-vous-en ! balbutia la jeune fille le visage caché dans ses mains ; allez-vous-en, vous me faites horreur !

— Tu ne m’aimes donc pas ? dit-il lui écartant les mains ; elle fermait les yeux pour ne pas le voir et renversait la tête, évitant ses lèvres.

Il couvrait sa robe de baisers fous ; mais elle se débattit si rudement, qu’il fut obligé de la laisser.

À sa grande surprise, les sens de cette fille dormaient comme son cœur.

Il essaya, du moins, d’éveiller son imagination, et, pendant une heure, il lui parla de l’amour en termes brûlants qui mettaient des rougeurs ardentes sur les joues de Gatienne. Cependant elle écoutait, poussée par une curiosité invincible. Puis, peu à peu, elle se redressa et fixa sur Robert ses grands yeux sombres. Elle l’examinait.

Tout à coup elle se leva et vint s’adosser à la fenêtre ouverte. Puis, d’une voix glacée :

— J’ignorais l’amour, dit-elle ; vous me l’avez