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serait le malheur de tous. Tu n’as pas voulu devenir ma femme ; tu resteras ma maîtresse : c’est mon droit. Je t’aime avec une passion terrible, Gatienne. Voilà treize ans, n’est-ce pas ?… Et je n’ai pas pu t’oublier ! Tu ne souffres pas seule, dit-il, la voix sourde : je te laisse aux bras de Fabrice…

La nuit était maintenant si épaisse, que l’ombre noire de la jeune femme disparaissait sur le fond de verdure sombre. On ne voyait que la blancheur de ses mains, qui pressaient son visage penché sur sa poitrine.

Elle semblait écrasée, ne bougeant plus.

— Allons, remettez-vous ! dit-il plus doucement.

Comme elle ne remuait pas, une sorte de honte lui vint de sa brutalité. Il balbutia :

— J’attendrai.

— Ohé ! cria Fabrice, qui atterrissait.

Gatienne leva brusquement la tête ; son regard égaré s’accrocha à celui de Robert.

— Rentrez, lui dit-il, rentrez vite. Et soyez prudente. Je dirai à Fabrice que vous êtes indisposée.

Il la regarda s’en aller docilement, sans un mot. Le glissement de sa robe sur le sable s’éteignit. Alors il courut à la berge. Clotilde débarquait.