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notre auberge. ’ Je m’y précipite. Ma première question est pour savoir s’il nous a fait à dîner. Au lieu de me répondre, il s’assied sur le lit en essuyant du pouce les larmes qu’il ne peut retenir. Inquiet de cette attitude, je lui demande ce qu’il y a. Après avoir longtemps hésité et comme à regret, sur mes prières mêlées de menaces, il finit par avouer : « Ton ami, ou ton camarade, cet Ascylte que voilà, est venu me trouver tout à l’heure dans cette chambre. Il a essayé de me prendre de force. Naturellement, moi, je criais. Alors il tire son épée : Si tu fais ta Lucrèce, tu vas, dit-il, trouver ton Tarquin. »

À ces mots, je faillis arracher les yeux à Ascylte. «  Qu’as-tu à dire, lui criai-je, vieille peau, qui n’es bon qu’à t’en faire mettre comme une femme et qui as la bouche pourrie comme le reste ? »

Il fit semblant de s’effondrer d’horreur ; puis, levant sur moi un poing menaçant, il se mit à crier encore plus fort : « Vas-tu te taire, ignoble gladiateur, ‘ assassin de ton hôte ’, réchappé de l’échafaud[1] ? Vas-tu te taire, rôdeur de nuit qui, même quand tu étais encore bon à quelque chose, n’as jamais trouvé à coucher avec une femme propre, toi qui m’as mis dans le bosquet à la même sauce que maintenant le petit dans ce bouge ? — ‘ Mais pourquoi diable ’, lui dis-je, te soustraire à cet entretien avec Agamemnon ?

  1. On faisait combattre les gladiateurs condamnés à mort sur un théâtre élevé au milieu de l’arène. Tout à coup le plancher s’entrouvrait et ces malheureux tombaient parmi les bêtes féroces ou dans les flammes. Le mot échafaud peut caractériser cette disposition.