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un jour ces propos et autres semblables, quand Agamemnon[1] s’approcha de nous et, d’un coup d’œil inquisiteur, chercha celui que la foule écoutait si religieusement. ’

III. CONTRE LA VÉNALITÉ DES MAITRES

Ce rhéteur, sortant tout suant de sa classe, pouvait-il souffrir que je pérorasse plus longtemps sous le portique qu’il ne l’avait fait dans l’école ? Il m’interrompit : « Jeune homme, dit-il, qui tenez ces propos d’une saveur non vulgaire et, ce qui est aujourd’hui une rareté, qui me semblez un ami des idées saines, je ne dois pas vous dérober les secrets de mon art. Dans les exercices que vous critiquez, il n’y a guère de la faute des maîtres : ils sont bien forcés de hurler avec les fous. S’ils ne parlaient pas comme il plaît aux jeunes gens, Cicéron l’a déjà dit, on les laisserait seuls dans leur école. Tels ces rusés flatteurs qui, entreprenant le siège de la table d’un riche, n’ont rien de plus pressé que de chercher ce qu’ils estiment devoir plaire à l’auditoire, et qui n’obtiendront en effet ce qu’ils cherchent qu’en tendant des pièges aux oreilles d’autrui, tel le maître d’éloquence : à moins, comme le pêcheur, de mettre à l’hameçon l’appât qu’il sait recherché du jeune poisson, il restera seul assis sur son rocher, sans espoir de rien prendre. »

  1. Il semble qu’Agamemnon le rhéteur soit le professeur d’Encolpe et d’Ascylte. C’est lui qui les amènera chez Trimalcion dont il est commensal, le flatteur et, pour tout dire, le parasite.