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fous quand ils crient comme des furieux : Voici les blessures que j’ai reçues pour la liberté ! Voici l’œil que j’ai perdu pour votre salut à tous ! Donnez-moi un guide pour me conduire chez mes enfants : mes jarrets tranchés se refusent à porter mon corps[1].

Passe encore si du moins ils frayaient à nos futurs Démosthène les voies de l’éloquence. Mais tant d’exagérations et tout ce vain bruit de phrases ne leur servent, le jour venu de parler au forum, qu’à avoir l’air de tomber de la lune.

Donc, à mon sens, le résultat le plus clair des études est de rendre nos enfants tout à fait stupides : de ce qui se présente en réalité dans la vie ils n’entendent rien, ils ne voient rien. On ne leur montre que pirates, les chaînes à la main, attendant leurs victimes sur le rivage ; que tyrans rédigeant des arrêts pour commander aux fils d’aller couper la tête de leur père ; qu’oracles préconisant, pour chasser la peste, l’immolation de trois vierges ou davantage ; que phrases s’arrondissant en pilules bien sucrées : faits et pensées, tout passe à la même sauce[2].

II. CONTRE LES PROFESSEURS DE RHÉTORIQUE

« A qui vit dans cette atmosphère, il est aussi impossible de ne pas perdre le sens que de sentir bon quand on loge à la cuisine.

  1. Dans la bataille on coupait les nerfs des jarrets au soldat vaincu, pour l’empêcher de fuir.
  2. Il est question dans le texte d’une sauce verte faite du suc de pavot et de sésame.

    Dioscoride dit que les Égyptiens tirent de l’huile du sésame. Les Turcs et les Grecs font un très grand usage de cette graine. On en récolte beaucoup en Sicile, où on le mêle au pain bis pour lui donner une saveur agréable.