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a heureusement beaucoup plus où, à force d’art, il revient au naturel.

Il a aussi de la tenue sinon dans le choix des sujets, du moins dans la manière de les traiter, et c’est à peine si les Bénédictins exagèrent quand ils disent dans leur Histoire littéraire de la France :

« Dans les plus vives descriptions qu’il fait des débauches de l’empereur et de ses favoris, il en adoucit toujours les images par des termes dont l’honnêteté et la modestie ne pourront être blessées. »

II appelait, il est vrai, les choses par leur nom, comme le lecteur s’en apercevra parfois, mais c’est l’usage constant du latin qui ignorait nos pudibonderies, et Martial ou Juvénal lui-même sont, quand ils s’y mettent, plus grossiers que lui.

Enfin, et fort heureusement, son sujet lui interdisant l’emploi continu d’une langue trop littéraire, il a dû recourir à la langue courante, à la langue légère, allante, vive, élégante, et pourtant naturelle qu’il parlait lui-même quand il n’était pas auteur. La trame de son récit est « d’un latin fin et précieux, qui est celui de la meilleure société[1] ».

Celui qu’emploient ses personnages est naturellement moins relevé, mais n’est pas moins vivant, original, pris sur le fait. Il vit à une époque où « tout devient populaire. Le vocabulaire, dit M. E. Thomas, est envahi par des termes nouveaux. La syntaxe est si particulière que l’idiome en prend un air presque étranger. Les phrases s’émaillent de réflexions prudhommesques, de grécisme, de solécismes, sans compter plus d’un emprunt à la langue verte de Rome. » Cette langue populaire, déjà corrompue, est du reste bien plus celle du Banquet que des Aventures d’Encolpe, mais qu’il faille ou non l’attribuer à Pétrone, combien n’est-elle pas plus intéressante pour nous avec sa verdeur pitto-

  1. Collignon, ouvr. cit., p. 330.