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observe a jailli l’oeuvre originale pleine d’entrain, de vie, de bonne humeur et d’ironie.

Sans doute, à notre goût, le littérateur de profession montre encore trop souvent le bout de l’oreille. Victime lui-même de l’école, bien que s’étant élevé contre l’éducation qui s’y donne, il conserve un faible pour les subtiles discussions académiques et le goût de la déclamation on a beau nous dire que c’est raillerie, simple caricature des romans sentimentaux, nous ne pouvons nous empêcher de trouver que les trois sacripants qui sont les héros de l’histoire expriment souvent leur douleur un peu bien longuement, d’une manière par trop théâtrale et abusent décidément du droit d’être sensibles. Vraiment, pour des coquins, ils pleurent trop, et tout cet étalage de sensiblerie emphatique ennuie et répugne.

Passons aussi sur les imitations dont notre auteur abuse un peu, soit qu’il incorpore à sa prose la substance des classiques, soit qu’il parodie les mauvais écrivains, soit que par jeu, par dilettantisme, il s’essaye à développer des thèmes déjà rebattus.

Nous avons hâte d’arriver au style de Pétrone qui, sans être parfait, car il n’est pas toujours exempt de préciosité et d’affectation, reste néanmoins excellent dans sa « latinité si classique encore malgré son modernisme[1] ». Servi sur ce point par ses doctrines et par ses études, il a su, quand il l’a voulu, écrire dans une langue pure qui reste naturelle dans sa savante simplicité et qui a la solidité classique.

Rapin dit bien que Pétrone n’a pas lui-même cette manière aisée et naturelle qu’il recommande tant aux autres ; il donne, dit-il, les plus belles règles du monde contre l’affectation, qu’il n’observe pas, car il affecte jusqu’à la simplicité du style, où il n’est pas toujours naturel. Mais s’il y a encore trop de pages où Pétrone donne raison à Rapin, il y en

  1. Collignon. op. cit., p. 190.