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dit : leur pupitre est, en fait de critique, le lit de fer de Procuste. La Bruyère riait sous cape des prétendues clefs ajustées à ses Caractères par des devins en défaut. Peut-être, un jour, tirant Artamène ou Clélie de la poussière, quelques savants en us les publieront tour à tour grossis de nouveaux tomes ; et pour prouver que Louis XIV est Cyrus ou Porsenna, ils joindront aux fadeurs de Scudéry, avec leurs propres visions, les variorum des commentateurs.

II. Forme du Satyricon. — « L’Espagnol Joseph-Antoine Gonsalle de Sallas a fait jadis une belle dissertation sur ce seul mot Satyricon. Son étymologie est-elle grecque ou latine ? Grande question parmi les érudits. Voici ce qu’Heinsius, Scaliger et plusieurs autres allèguent en faveur de la première opinion. Les Grecs appelaient satyriques certains drames, moitié sérieux, moitié bouffons, dans lesquels les acteurs, le visage barbouillé de lie, imitaient les danses grotesques, ainsi que les propos un peu lestes des divinités des bois, et tournaient en ridicule, dans la personne des magistrats et des riches, les véritables dieux de la terre. Ces drames eurent cours longtemps encore après Thespis : il nous en reste un modèle dans le Polyphème d’Euripide. D’après cette hypothèse, notre mot satyre vient du grec Σάτνρος, faune ou satyre il doit alors s’écrire par un y[1].

« Casaubon, Spanheim et Dacier ne manquent point d’arguments pour combattre Heinsius et Scaliger. Ils dérivent satyre du latin satura (plat rempli de différents mets)[2]. Si vous demandez quelle analogie peut exister entre un plat rempli de différents mets et les satyres d’Horace, par exemple, on vous répond que ce genre de poésie est farci, pour ainsi dire, de quantité de choses diverses,

  1. Les manuscrits portent les uns Satyricon, les autres Satiricon.
  2. Comparez à nos expressions françaises : Œuvres mêlées, Mélanges.