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L'ŒUVRE DE PÉTRONE

son âme et d’un défaut total de principes que de l’emportement des passions et de la force du vice. Egalement attrayant pour les deux sexes, il se prête, sans préférence marquée, aux plaisirs de l’un et de l’autre. Partout on le voit céder et jamais attaquer. Enfin, il montre de la douceur, de la raison, de la gentillesse, surtout une certaine grâce enfantine qui, pour ainsi dire, fait parfois oublier à quel point s’avilit sa personne.

« Tel est l’objet d’une passion qui, selon le plan général du roman, devait avoir régné, sinon exclusivement, du moins avec plus d’empire que tout autre sentiment accidentel et passager, dans le cœur d’Encolpe, durant un temps considérable il en est constamment et violemment occupé pendant la période qu’embrassent nos fragments. Sur quel pied, je veux dire en quelle condition Encolpe, intrinsèquement, était-il censé tenir Giton avec lui ? c’est ce qu’il n’est pas aisé de déterminer. En certains endroits et d’après la mention de quelques services, tenant de la pure domesticité, auxquels Giton paraît non seulement résigné sans réclamation, mais comme parfaitement accoutumé, on serait tenté de prononcer que, en tout, il doit être censé avoir été mis en scène comme domestique : et véritablement, s’il faut décidément admettre l’authenticité du fragment trouvé à Trau, il faudra aussi convenir que Giton avait été mené chez Trimalcion comme devant servir les deux amis, Ascylte et Encolpe. Mais habituellement on rencontre tant de motifs frappants de penser différemment, qu’on ne saurait adopter cette idée ; l’union d’Encolpe avec Giton est trop étroite. Il le traite toujours de frère, et vit en effet avec lui, comme avec la sœur, comme avec la maîtresse, comme avec l’épouse la plus hautement avouée. Même logis, même table, même lit, mêmes compagnies tout à ces deux amants est commun. Ni les plaisirs, ni les voyages, ni les arrangements de société ne les séparent ; il semble que foncièrement un contrat