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ciliait les faveurs de sa maîtresse mais me tenait elle-même à distance comme un esclave, parce que j’en portais l’habit, elle, qui jadis méprisait ma condition servile, veut maintenant me suivre, même au péril de sa vie ‘ et jure, en me dévoilant la violence de son amour, qu’elle ne peut plus vivre qu’à mes côtés.

« Mais tout-entier à Circé, je méprise toutes les autres. Et, en effet, qui la surpasse en beauté ? Quelle Ariane, quelle Léda a atteint cette perfection ? Que peuvent à côté d’elle Hélène et Vénus même ? Et Pâris, juge du différend des trois déesses, s’il avait vu entrer en ligne ces yeux si vifs et si provocants, leur eût sacrifié et Hélène et les déesses. Si du moins il m’était permis de lui ravir un baiser et de presser un instant sur la mienne cette poitrine aux formes divines, peut-être mon corps recouvrerait-il son ancienne vigueur, peut-être cet organe, assoupi sans doute par quelque maléfice, se réveillerait-il. Ses outrages même n’arrivent pas à me lasser. Qu’elle m’ait fait battre, je n’en sais plus rien qu’elle m’ait mis à la porte, ce n’est pour moi que jeu, pourvu qu’il me soit permis de rentrer en grâce. »

CXXXIX. OU CHRYSIS POURSUT POLYÆNOS DE SA TENDRESSE

‘ Ces réflexions et bien d’autres semblables, jointes au souvenir obsédant de tant de charmes, excitèrent mon imagination au point que, ’ dans mon délire, je m’en prenais à mon lit, comme s’il eût offert à ma rage amoureuse une image de ma beauté : ‘ mais tous ces efforts restèrent encore vains. ’

« Enfin une persécution si ’ opiniâtre ‘ vint à bout de ma patience : je couvris d’outrages le génie ennemi qui