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le montre se targuant de la poltronnerie dont sa conscience habituellement l’accusait. En plus d’un endroit, Encolpe donne à entendre qu’il n’était point brave et que ses menaces, quand il en faisait, étaient uniquement de la forfanterie ; ailleurs il récite naïvement les reproches que son compagnon de débauche et de friponnerie lui faisait de sa lâcheté réelle on verra que lui-même en badine.

« Après bien des aventures, qui ne sont que très obscurément (même inintelligiblement) indiquées, Encolpe s’était violemment épris d’un jeune adolescent, que partout il nomme Giton. Celui-ci devait être un enfant, né aussi de parents libres. Je dis de parents libres, mais que l’on doit supposer pauvres et fort peu délicats (puisqu’ils l’avaient eux-mêmes livré à un esclavage dont il n’avait pu briser la chaîne qu’aux dépens de sa pudeur et en abandonnant sa personne à un maître libertin). Le passage d’où je tire cette induction peut prêter à une autre interprétation, je le sais ; mais la différence que cette interprétation apporterait dans les notions qui concernent Giton ne mérite pas qu’on en fasse l’objet de la moindre discussion. Il est certain qu’Encolpe lui-même nous le représente comme avouant aisément toute sa turpitude, se reconnaissant digne du sort le plus malheureux, puisqu’il avait donné dans le jeu dès qu’il avait pu raisonner, et que s’il était devenu libre ce n’avait été que par l’infamie ; il convenait d’avoir été vendu, comme fille, à un acheteur, lequel ne s’y trompait point, et en feignant de se laisser abuser par une mère avide ou nécessiteuse qui sacrifiait son enfant, s’estimait heureux de pouvoir s’assurer ainsi, sans paraître les avoir préalablement cherchées, des jouissances ; précieuses à son goût dépravé, mais dont un désir trop hautement annoncé l’eût fait rougir en public. Du reste, Giton ne manque ni d’un fonds de bonté dans le cœur, ni d’une sorte de justesse dans l’esprit. Ses désordres, ses coupables complaisances paraissent venir plutôt de la faiblesse de