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Alors, d’un cœur furieux, elle profère ces parole :
« Et maintenant, aux armes, peuples aux esprits échauffés,
Aux armes, et lancez les torches au milieu des villes !
Sera vaincu quiconque se cache : la femme ne se croisera pas les bras,
Ni l’enfant, ni la vieillesse déjà désolée par l’âge ;
Que la terre elle-même tremble et que les toits déchirés entrent en guerre,
Toi, Marcellus, défends les lois ; toi, soulève le peuple,
Curion, et toi, Lentulus, ne néglige pas Mars l’intrépide.
Mais toi, divin César, pourquoi tarder à te servir de tes forces,
Ne pas enfoncer ces portes, ne pas forcer les murs de ces villes ?
Pourquoi respecter ces trésors ? Et toi, Pompée, ne saurais-tu plus protéger
Les citadelles romaines ? Recherche les murailles d’Epidamne[1],
Et teins de sang humain les vallons de Thessalie.
— Et tout ce que la Discorde avait ordonné, tout cela eut lieu sur la terre[2].

Eumolpe avait déclamé ses vers avec beaucoup de feu. Mais déjà nous arrivions à Crotone. Descendus dans une petite auberge, nous sortions le lendemain pour chercher un gîte de plus d’apparence, quand nous tombâmes sur une bande de coureurs d’héritages[3] qui nous demandèrent qui nous étions et d’où nous venions. Comme il avait été convenu entre nous, nous répondîmes avec un tel empressement et un tel luxe de détails qu’ils nous crurent sans hésiter. Et les voilà aussitôt en lutte, chacun s’acharnant à mettre sa bourse à la disposition d’Eumolpe et à s’insinuer dans ses bonnes grâces en le comblant de présents.

  1. Dyrrachium.
  2. Burmann, constatant de l’enflure dans ce morceau, en conclut que Pétrone la force pour ridiculiser Eumolpe ! Pour M. Collignon « ce n’est qu’une anti-Pharsale assez mal venue », un poème ultra-classique, mais auquel manque la dernière main, une déclamation vague et vide contre le luxe et l’avarice, que déparent de nombreuses répétitions. Voltaire caractérise le poème d’un mot : « Une déclamation pleine de pensées fausses. »
  3. Pétrone aime ces contrastes.