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son cœur. Je lui demandai instamment quelle était la cause de sa douleur. ’ Après s’être fait quelque temps prier elle éclata : « Si vous avez encore du sang propre dans les veines, vous ne ferez plus aucun cas de cette peau ; si vous êtes un homme ‘ vous plaquerez cette salope. ’ »

Toute cette salade m’embêtait fortement, mais ce que je craignais le plus, c’est qu’Eumolpe ne s’aperçut de ce qui se passait. Ce blagueur incorrigible n’avait plus qu’à se mettre en tête de venger par une satire mes prétendus affronts ! ‘ Son zèle aveugle n’eût pas manqué de me couvrir d’un ridicule éclatant, et cette idée seule me faisait trembler.

Pendant que je me creusais la tête pour trouver le moyen de tout laisser ignorer à Eumolpe, le voilà qui entre tout à coup, n’ignorant déjà plus rien de ce qui s’était passé. Tryphène, en effet, avait tout raconté à Giton et avait cherché à prendre aux dépens du frère, une revanche de mes dédains, ce qui avait mis Eumolpe dans une rage épouvantable, et ce d’autant plus que tout ce dévergondage constituait une violation éclatante du traité signé.

Dès qu’il m’aperçut, le vieillard, après avoir plaint mon triste sort, me mit en demeure de lui expliquer comment les choses s’étaient passées. Je ne pus que lui avouer carrément les hardiesses obscènes de Lycas et les élans dévergondés de Tryphène, attendu qu’il les connaissait déjà. Mon témoignage entendu ’, il jure en termes formels ‘ qu’il va nous venger certainement et que les dieux sont trop justes pour que tant de crimes restent impunis ’.