Page:Petrone - Satyricon, trad. de langle, 1923.djvu/266

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

riait pas, mais secouant une tête indignée : « Si le gouverneur, dit-il, avait été juste, il eût fait reporter dans son tombeau cet honnête bourgeois et mettre la femme en croix. »

Sans aucun doute, c’étaient son lit souillé par moi et son navire si bien mis au pillage dans notre fuite audacieuse qui lui trottaient encore par la tête. Mais les termes du traité ne l’autorisaient pas à se souvenir, et, du reste, l’hilarité générale ne lui permettait pas de donner libre cours à sa colère.

De son côté Tryphène, toujours couchée dans les bras de Giton, tantôt couvrait son sein de baisers, tantôt rajustait les boucles de sa chevelure d’emprunt.

Quant à moi, j’étais profondément triste : j’assistais, la mort dans l’âme, à leur raccommodement ; j’en perdais le boire et le manger et je ne savais que les foudroyer de regards obliques et farouches. Chaque baiser, chaque caresse, tout ce qu’enfin imaginait une femme dévergondée me blessait au cœur. Et je ne savais si j’en voulais davantage à ce garçon de me souffler ma maîtresse, ou à cette amie qui me débauchait mon mignon. Spectacle pénible à mes yeux et plus odieux que ma captivité passée.

Pour comble, Tryphène évitait de me parler, à moi son ami, son amant jadis si cher. Giton ne me jugeait pas digne qu’il bût, suivant l’usage, à ma santé et, ce qui eût été le moins, ne daignait pas même m’adresser une parole banale ; il craignait, je crois, au moment où il rentrait en grâce, de rouvrir une cicatrice encore mal fermée.

Je ne pouvais retenir les larmes que m’arrachait la douleur, et les gémissements que je m’efforçais de dissimuler sous des soupirs m’étouffaient presque.

‘ Tandis que je me désolais, grâce sans doute au charme artificiel que me prêtait ma perruque blonde, Lycas se