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‘ L’avis nous parut bon ’ et nous le mîmes immédiatement à exécution. Nous nous approchons donc sans bruit du bord du vaisseau et nous livrons notre tête au barbier, ainsi que nos sourcils. Puis Eumolpe nous garnit le front de lettres énormes, et, d’une main généreuse, nous trace sur toute la figure la marque des fugitifs.

Mais un des voyageurs qui, penché sur le flanc du navire, soulageait son estomac barbouillé par le mal de mer, aperçut au clair de lune notre barbier vaquant à ses fonctions à cette heure indue. Il maudit ce funeste présage, car ce n’est qu’à la dernière extrémité que les marins font vœu de sacrifier leur chevelure, puis retourna se jeter sur son lit. Nous fîmes semblant de ne pas entendre ses invectives : ressaisis par notre tristesse et observant un silence prudent, nous passâmes le reste de la nuit dans un sommeil agité.

‘ Le lendemain, dès qu’Eumolpe sut Tryphène debout, il entra dans la chambre de Lycas. Il fut question d’abord de l’heureux voyage que promettait un si beau temps. Puis Lycas se tournant vers Tryphène, lui dit : ’

CIV. LA VENGEANCE DE PRIAPE : LE SONGE RÉVÉLATEUR

« Priape[1] m’est apparu pendant mon sommeil et m’a dit : « Cet Encolpe que tu cherches, sache que je l’ai conduit moi-même sur ton navire. » Tryphène se récria : « C’est à croire que nous aurions couché ensemble. Car, à moi aussi, cette statue de Neptune que j’avais remarquée sous le péristyle du temple de Baïes m’est apparue et m’a dit : « C’est sur le navire de Lycas que tu retrouveras Giton. »

— Ainsi vous saurez, répliqua Eumolpe, quel grand

  1. Encore une vengeance de Priape.