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CII. SUITE DE LA DÉLIBÉRATION

« C’est donc l’audace, m’écriai-je à mon tour, qui reste notre seul refuge : descendons dans la barque en nous laissant glisser le long du câble, coupons-le, et, pour le reste, confions-nous à la fortune. Quant à Eumolpe, je n’entends pas l’associer à nos périls. A quoi bon entraîner un innocent dans des dangers où il n’a rien à faire. Trop content, si le hasard favorise notre fuite.

— Cet avis, répondit Eumolpe, serait plein. de prudence s’il avait la moindre chance d’aboutir. Croyez-vous filer sans qu’on s’en aperçoive ? Et, en tout cas, comment échapper au pilote qui, toujours en éveil, épie la nuit les mouvements des astres eux-mêmes ? En admettant même qu’il s’endorme, il faudrait au moins fuir par un autre côté que celui où il se tient : or c’est par la poupe, à côté même du gouvernail, qu’il nous faut descendre, puisque c’est là qu’est attaché le câble qui retient la barque. Du reste, et je m’étonne, Encolpe, que tu n’y aies pas songé, il y a un matelot qui, jour et nuit, est perpétuellement de garde dans la barque ; il n’y a que deux. moyens de s’en débarrasser : ou le tuer, ou le jeter à l’eau de vive force. Cela vous paraît-il possible ? Interrogez votre courage. Car, en ce qui concerne ma collaboration, je ne reculerai devant aucun péril, à condition qu’il apporte quelque espérance de salut. Et je ne pense pas que vous non plus vous teniez à perdre la vie de gaîté de cœur.

« Voyez donc si ceci ne vous conviendrait pas : je vais vous mettre dans deux des peaux. Bien ficelés parmi mes vêtements, entre des courroies, je vous ferai passer pour des bagages. Je ne laisserai qu’une petite fente par où vous pourrez respirer et prendre quelque nourriture. Je