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ture, déjà je passais mon cou dans le nœud, quand, par la porte qui s’ouvre, entre Eumolpe avec Giton qui de la fatale borne me ramènent à la vie. Giton surtout, passants brusquement d’une douleur folle à une rage sauvage, pousse un grand cri et, me bousculant, des deux mains me jette à la renverse sur le lit : « Tu te trompes, cria-t-il, Encolpe, si tu crois qu’il t’est permis de mourir le premier. C’est moi qui ai commencé : chez Ascylte, j’ai cherché une épée… En vain ! Mais si je ne te retrouvais pas, résolu à périr, je me serais jeté dans un précipice. Et pour que tu saches bien que ça ne traîne pas quand on cherche la mort, regarde à ton tour ce que tout à l’heure tu voulais me faire voir. » Ayant dit, il arrache un rasoir au valet d’Eumolpe[1], et, s’en tranchant le cou, de droite, de gauche, le voilà étalé à nos pieds.

Médusé, je pousse un grand cri et, le suivant dans sa chute, je demande au même ustensile un chemin vers la. même mort. Mais sur Giton, pas trace de blessure, chez moi pas la moindre douleur ! car c’était un rasoir innocent, émoussé tout exprès pour donner de l’audace aux apprentis barbiers, qui garnissait la trousse. C’est pourquoi le valet à qui Giton avait pris cette ferraille ne s’était pas ému, et. Eumolpe lui-même n’avait pas bougé pour empêcher cette mort de comédie.

XCV. OU LE VIEUX POÈTE EUMOLPE FAIT PREUVE D’UNE FOUGUEUSE INTRÉPIDITÉ

Tandis que cette pièce se joue entre amoureux, l’hôte fait son entrée avec le ‘ second ’ service, et nous trouve

  1. Le latin dit mercenarius, domestique à gages, terme qu’il ne faut pas confondre avec servus, qui veut dire aussi domestique, mais désigne un esclave.