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Car l’aimable enfant, lui non plus, ne pouvait arrêter les sanglots qui secouaient tout son beau corps.

« Quelle honte, m’écriai-je, de t’aimer ainsi quand tu m’as abandonné ! Dans ce cœur où tu avais fait une si profonde blessure, je ne trouve plus même la cicatrice ! M’expliqueras-tu pourquoi tu as été aimer ailleurs ? Ai-je mérité le mal que tu m’as fait ? »

‘ Giton ’, sentant combien je le chérissais encore, reprit un peu contenance.’

« ‘ Pourtant, insistai-je ’, je n’avais pas porté ce débat d’amour devant un autre juge que toi-même : mais va, je ne me plains plus, j’ai déjà tout oublié, pourvu qu’au moins tu regrettes sincèrement tout le mal que tu m’as fait. »

Je gémissais et je pleurais en soulageant mon cœur par ces discours. Alors Giton, m’essuyant les yeux avec son manteau : « Voyons, Encolpe, dit-il, j’en appelle à ta mémoire et à ta bonne foi : t’ai-je abandonné ou n’est-ce pas plutôt toi qui t’es trahi ? Pour ma part, j’avoue, et sans balancer, qu’entre deux hommes armés, c’est au plus fort que j’ai été. »

J’embrassai la bouche d’où sortaient ces paroles pleines de sens, puis, me jetant au cou de mon ami, je l’étreignis passionnément pour bien lui montrer que je lui rendais mon cœur et que notre affection renaissante était plus forte et plus solide que jamais.

XCII. OU EUMOLPE TROUVE GITON A SON GOUT ET NE CRAINT PAS DE LE DIRE

Il était déjà tout à fait nuit, et la femme avait exécuté mes ordres pour le souper, quand Eumolpe frappa à la