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Cassandre qui, chez moi, prétend porter les chausses. Moi qui, quand je n’étais qu’un sans le sou, trouvais déjà un parti de dix millions de sesterces ! Vous savez bien, Habinnas, que c’est la vérité pure. Hier encore, Agathon le parfumeur m’a tiré à part pour me presser de ne pas laisser périr ma race. Moi, pour me conduire en galant homme et ne pas paraître volage, voilà que je me donne à moi-même de la cognée dans les jambes. C’est bien ! je ferai le nécessaire pour que, moi mort, tu me cherches en grattant la terre avec tes ongles et que, dès aujourd’hui, tu comprennes quel tort tu t’es fait. Habinnas, je vous défends de mettre sa statue sur mon monument. Je veux au moins que, mort, elle me fiche la paix. Et pour qu’elle sache bien que je suis assez méchant pour faire du mal à quelqu’un, je lui défends de m’embrasser après ma mort ! »

XXXV. OU TRIMALCION FAIT SON PROPRE ÉLOGE ET L’HISTOIRE DE SA FORTUNE

Quand il eut bien fulminé, Habinnas entreprit de le calmer : « Il n’y a, dit-il, personne au monde qui ne commette des fautes. Nous sommes des hommes, non des dieux. » Scintilla. joignit en pleurant ses instances à celles de son mari. Elle le supplia, au nom de son génie et en l’appelant Gaïus, de se laisser fléchir. Trimalcion ne put .retenir plus longtemps ses larmes : « Je vous en prie, dit-il, Habinnas, sur tous les vœux que je forme pour votre fortune, si j’ai fait quoi que ce soit de travers, crachez-moi à la face. J’ai embrassé cet honnête jeune homme, non pour sa beauté, mais pour rendre hommage à ses qualités morales : il connaît les dix parties du discours, il lit