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donna l’idée à Trimalcion de faire venir Scylax, gardien de sa maison et de sa famille.

Aussitôt on introduit un chien énorme, solidement enchaîné. D’un coup de pied le portier lui ordonne de se coucher, et il s’étend devant la table. Trimalcion lui jette du pain blanc en disant : « Personne dans cette maison ne m’aime plus que celui-là. »

Le mignon, jaloux des éloges accordés à Scylax, pose sa chienne à terre et la pousse à la lutte. Scylax, conformément aux mœurs de la race canine, commence par remplir la salle d’aboiements épouvantables, puis se jette sur la Perle, qu’il faillit mettre en pièces.

Mais cette bagarre ne fut qu’un prélude à de pires esclandres, car, un lustre tombant sur la table, brisa le cristal qui s’y trouvait, et couvrit d’huile bouillante quelques-uns des convives.

Trimalcion, pour ne pas paraître ému de la casse, embrassa son bijou et lui dit de monter sur son dos. L’autre ne se fait pas prier, enfourche sa monture, lui frappe les épaules du plat de la main et s’écrie en éclatant de rire : «  Eh gourde ! Combien en vois-tu[1] ? »

Trimalcion se prêta quelque temps au jeu, puis ordonna de remplir de vin un grand vase et de le partager à tous les esclaves qui étaient assis à nos pieds, avec cette recommandation : « S’il y en a un qui ne veut pas boire, jette-lui le vin au travers de la face. Dans le jour les affaires sérieuses maintenant vive la joie ! »

  1. Ce jeu est une variante de la mourre : celui des deux joueurs qui est à cheval sur le dos de l’autre le frappe d’une main et lève un certain nombre de doigts de l’autre main. Il continue à frapper jusqu’à ce que l’autre ait deviné combien de doigts il a levés.