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C’est bien : je te retrouverai, morveux, fumier ! Je veux perdre jusqu’à mon dernier sou si je ne force ton maître à se fourrer dans un trou de souris. Et je ne t’oublierai pas, je te le promets. Tu pourras alors appeler à ton secours le grand Jupiter : j’aurai le plaisir d’allonger ta sale tignasse, et ton maître, lui aussi, ce rien du tout, je me le mettrai bien un jour sous la patte. Ou je ne me connais pas, ou je te ferai passer l’envie de rire, quand bien même tu aurais la barbe en or. J’attirerai la colère de Sagana, la sorcière, et sur toi et sur le malotru qui s’est chargé de ton éducation. Je n’ai pas appris, moi, la géométrie, la critique, et toutes vos foutaises, mais je possède tout de même le style lapidaire et je sais faire la division en cent parties suivant le métal, le poids et la somme.

« Pour en finir, si tu veux, nous allons faire, toi et moi, une gageure je te laisse le choix du sujet. Il faut que je te montre que ton père a perdu son argent, bien qu’il t’ait fait apprendre la rhétorique. Dis-moi quel est celui de nous qui vient lentement et qui va loin ? Paye-moi : je te le dirai. Qui de nous court et pourtant ne change pas de place ? Qui grandit et devient tout petit ? Tu t’agites, tu restes bouche bée, tu te démènes comme une souris dans un pot de chambre. Eh bien, ou ferme ta gueule, ou laisse tranquille qui se trouve plus fort que toi et ignore même si tu es au monde. Est-ce que tu crois m’épater avec ces bagues couleur de buis que tu as sans doute volées à ta maîtresse ? Que Mercure au pied rapide nous soit propice ! Allons ensemble au forum, et empruntons de l’argent. Tu verras si cet anneau de fer que je porte a du crédit[1]. Ah ! c’est du joli ; te voilà confus comme

  1. L’anneau de fer indique un esclave ou un affranchi. Il est question ici d’un de ces anneaux qui servaient de sceau. Nous dirions aujourd’hui : Tu verras ce que vaut ma signature.