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non, et il s’engagea dans je ne sais quelle argumentation. Mais aussitôt Trimalcion : « Pardon, si c’est un fait réel, il n’y a pas à discuter ; s’il n’est pas réel, ce n’est rien. » Nous nous répandons en louanges sur ces fariboles et autres de la même farine.

« Je vous prie, Agamemnon, mon très cher, dit-il, vous souvient-il des douze travaux d’Hercule et de la fable d’Ulysse ? Et comment le Cyclope lui rabattit le pouce avec une baguette ? Combien de fois, quand j’étais petit, l’ai-je lu dans Homère ? J’ai même vu, de mes yeux vu, la Sibylle de Cumes suspendue dans une fiole, et quand les enfants lui demandaient, en grec « Sibylle, que veux-tu ? » la pauvre répondait, en grec aussi : « Je veux mourir. »

XLIX. LE CUISINIER DISTRAIT ET LES MERVEILLES QUI S’ENSUIVIRENT

Il aurait divagué longtemps, mais on servit l’énorme porc sur un plateau qui occupa toute la table[1]. Nous nous récrions sur la diligence du cuisinier nous jurons qu’il n’y avait pas eu le temps de rôtir un poulet… Et ce d’autant plus que ce porc cuit nous paraissait beaucoup plus grand qu’un instant avant le porc vivant[2].

Mais voilà que Trimalcion le scrute d’un regard qui se fait de plus en plus sévère : « Comment, comment, on ne l’a pas vidé ? Ma parole, il l’a oublié. Vite, vite, ici le cuisinier » Le pauvre diable avance et avoue qu’il a

  1. C’est le quatrième service.
  2. Il est donc permis de soupçonner un truquage : on a simplement reconduit les trois porcs à l’étable, puis introduit le porc cuit qui était tout prêt.