Page:Petrone - Satyricon, trad. de langle, 1923.djvu/157

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aujourd’hui arrivera demain. Il n’y aurait pas de meilleur pays que celui-ci, si seulement il y avait des hommes. Il souffre en ce moment, mais il n’est pas le seul. Il ne faut pas nous montrer trop difficiles. Le même soleil luit pour tout le monde. Si tu étais ailleurs, tu dirais qu’ici les alouettes tombent du ciel toutes rôties.

« N’allons-nous pas avoir dans trois jours une fête magnifique, un combat où figureront non seulement des gladiateurs, mais un grand nombre d’affranchis[1]. Titus, mon maître, est un homme aux vues larges, qui a le cerveau toujours en ébullition : il y aura quelque chose d’extraordinaire d’une manière ou de l’autre. Je le connais bien, étant de la maison. Il ne fait pas les choses à moitié. Il donnera aux combattants le fer le meilleur ; il leur refusera le droit de fuir. Nous sommes donc sûrs d’assister à un magnifique carnage. Et il a de quoi se payer ça. Il a hérité de trente millions de sesterces à la mort de son père. Quand bien même il en gaspillerait quatre cent mille, sa fortune n’en souffrira pas, et il y gagnera une gloire impérissable.

« Il a déjà pour ce spectacle quelques petits chevaux gaulois avec une conductrice de char à la gauloise, et surtout l’intendant de Glycon, qui s’est fait pincer pendant qu’il était en train de combler d’aise sa maîtresse. Les uns prennent parti pour le mari jaloux, les autres pour l’amant : il y aura de quoi rire. En attendant, Gly-

  1. Les gladiateurs étaient ordinairement des esclaves. Mais les Romains préféraient voir s’entr’égorger des affranchis et des hommes libres. Néron, d’après Suétone, fit même paraître dans l’amphithéâtre mille chevaliers et sénateurs, et contraignit quelques-uns des plus considérables à combattre non avec des hommes, mais avec des bêtes féroces. Il n’épargna même pas les femmes. Caligula trouva moyen de renchérir encore sur Néron.