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son coude[1], à savourer ce vin : buvons assez pour que nagent les polissons que nous avons mangés. Je vous le demande, pensez-vous que je me contente des plats qui remplissaient les compartiments de ce surtout ? Ce serait mal connaître les ruses d’Ulysse[2]. Mais quoi ? Même en mangeant, ne négligeons pas la science. Que les cendres de mon ancien maître reposent en paix : c’est lui qui a fait de moi un homme entre les hommes. Aussi ne peut-on rien me présenter dont la nouveauté me prenne au dépourvu : je vais donc, mes bien chers, vous expliquer les mystères du globe que vous avez vu. Le ciel où habitent douze dieux prend successivement la figure de chacun d’eux. Voici tout d’abord le Bélier. Quiconque naît sous ce signe possède beaucoup de troupeaux, beaucoup de laine, et en outre, une tête dure, un front sans pudeur, une corne menaçante. Beaucoup de savants et de chicaniers vivent sous son influence. »

Nous applaudissons à cette fine plaisanterie et notre astrologue continue : « C’est ensuite le Taureau qui règne sur la voûte entière des cieux. Alors naissent les récalcitrants, les bouviers, ceux qui ne songent qu’à manger. Sous les Gémeaux, ceux qui aiment aller par deux comme les chevaux, les bœufs, les testicules et ceux qui partagent leurs faveurs entre les deux sexes[3]. C’est sous le Cancer que je suis né. Donc, j’ai un pied partout : mes possessions

  1. La bienséance exigeait qu’on se tint droit à table. Il était d’aussi mauvais goût, à Rome, de s’appuyer sur son coude que, chez nous, de mettre ses coudes sur la table.
  2. Trimalcion étale son érudition. Il cite ici Virgile, au livre II de l’Enéide.
  3. On peut comprendre également : et ceux qui ménagent la chèvre et le chou. Le sens de ce discours est du reste très obscur. Il est probable que c’est à dessein que l’auteur met des billevesées presque incompréhensibles dans la bouche de Trimalcion.