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déchaussée, est assise sur l’herbe au milieu des fleurs, impitoyable pour moi, et pour toi pleine d’orgueil.

Je suis prisonnier ; mais si ton arc vigoureux a encore quelque pitié, et si tu possèdes encore quelque flèche, venge-nous toi et moi, ô mon maître.


SONNET LXXXII.

Une habitude ne se perd pas, quelque dommage qu’on en retire, témoin son propre exemple.

Le ciel a déjà évolué pendant dix-sept ans, depuis que j’ai brûlé pour la première fois, et jamais mon ardeur n’a été éteinte ; mais il arrive que lorsque je pense de nouveau à mon état, je sens un froid glacial au milieu des flammes.

Bien vrai est le proverbe : on change de peau plutôt que d’habitude, et pour assoupir les sens, les affections humaines ne sont pas moins intenses. Cela nous vient de l’ombre mauvaise du lourd voile qui nous recouvre.

Hélas ! hélas ! Quand viendra le jour où, regardant fuir mes années, je sortirai du feu qui me consume et d’un si long tourment ?

Verrai-je jamais le jour où le doux air du beau visage de Laure plaira à mes yeux autant que je voudrais, et autant qu’il convient ?


SONNET LXXXIII.

Laure a pâli à la nouvelle qu’il doit s’éloigner d’elle.

Cette légère pâleur qui recouvrit d’un amoureux nuage le doux rire de Laure, frappa mon cœur avec tant de force, qu’elle me remonta en plein visage.

Je reconnus alors comment au paradis les bienheu-