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SONNET LXXIV.

Le doux et affectueux salut de sa dame le rend fou de plaisir.

La Dame qui porte mon cœur sur son visage, m’apparut à l’endroit où j’étais assis, tout entier à mes belles pensées d’amour ; et moi, pour me faire honneur, je me levai, le front respectueusement incliné et tout pâle.

Aussitôt qu’elle se fut aperçue de mon état, elle se tourna vers moi avec un air si nouveau, qu’elle aurait fait tomber la foudre des mains de Jupiter même au moment de sa plus grande fureur, et vaincu sa colère.

J’étais tout tremblant ; et elle continua son chemin, me parlant de telle façon que je n’eus pas la force de supporter ses paroles, ni le doux éclat de ses yeux.

Maintenant, je me retrouve plein de joies si diverses, en pensant à ce salut, que je ne sens plus de douleur, et que je n’en ai plus senti depuis.


SONNET LXXV.

Il révèle à son ami l’état de son âme.

Sennuccio, je veux que tu saches de quelle façon je suis traité, et quelle vie est la mienne. Je brûle et je me consume encore comme d’habitude. Laure me gouverne à son gré, et je suis toujours celui que j’étais.

Ici je la vis humble, et ici altière ; tantôt farouche, et tantôt calme ; tantôt impitoyable et tantôt compatissante ; tantôt revêtue d’honnêteté et de grâces ; tantôt douce et tantôt dédaigneuse et farouche.