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lumière, je revienne à mon autre vie et à de plus belles entreprises ; de façon qu’ayant tendu ses lacs en vain, mon dur adversaire en reste tout confus.

Voici, mon Seigneur, que finit la onzième année depuis que je me suis soumis à cet impitoyable joug, d’autant plus dur qu’il a à faire des sujets plus soumis.

Aie pitié de mon martyre immérité ; remets mes pensées désordonnées en un meilleur chemin, et fais-les souvenir que c’est en un jour comme aujourd’hui que tu fus mis en croix.


BALLADE V.

Il démontre que sa vie est dans les mains de Laure.

En jetant les yeux sur ma pâleur nouvelle, qui rappelle aux gens l’image de la mort, vous avez été émue de pitié ; et, me saluant doucement, vous avez conservé la vie à mon cœur.

La frêle vie qui est encore en moi, fut un don manifeste de vos beaux yeux et de votre voix angélique et suave. Je reconnais que c’est à eux que je dois l’état où je suis ; c’est eux qui, comme l’animal se réveille aux coups de verge, ont réveillé en moi mon âme appesantie. Vous avez en mains, Madame, l’une et l’autre clef de mon cœur, et je suis content de cela, prêt à naviguer à tous les vents ; car tout ce qui vient de vous m’est un doux honneur.