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SONNET XXXIV.

En présence de Laure, il ne peut plus parler, ni pleurer, ni soupirer.

Quoique je t’aie, autant que j’ai pu, gardée de mensonge, et honorée constamment, ô langue ingrate, tu ne m’as cependant pas encore fait honneur, mais tu as au contraire attiré sur moi l’ire et la vergogne.

Car, plus j’ai besoin de ton aide pour demander merci, plus tu restes froide ; et si tu profères quelques paroles, elles sont imparfaites et comme d’un homme qui rêve.

Tristes larmes, vous aussi vous me tenez toutes les nuits compagnie, alors que je voudrais être seul ; puis vous fuyez en présence de celle qui est ma paix.

Et vous, si prompts à me remplir d’angoisse et de douleur, soupirs, vous vous traînez alors lents et entrecoupés. Seul mon visage ne cesse d’exprimer l’état de mon cœur.


CANZONE IV.

Tous les êtres se reposent après leurs travaux, et lui n’a jamais de repos.

À l’heure où le soleil, dans sa course rapide, décline à l’occident, et que notre jour vole vers des peuples qui l’attendent peut-être par là-bas, lasse, la pauvre vieille voyageuse, se voyant seule en lointain pays, redouble ses pas et presse de plus en plus sa marche. Et puis toujours seule, à la fin de sa journée, elle est parfois soulagée par quelque court repos, dans lequel elle oublie les ennuis et les malheurs de sa vie passée. Mais hélas ! toutes les douleurs que le jour m’amène,