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du destin que Rome, notre tête, est maintenant confiée à ton bras qui peut la secouer fortement et la relever. Porte sans crainte la main sur sa vénérable chevelure et dans ses tresses éparses, de façon à tirer cette indolente de sa fange. Moi, qui jour et nuit pleure sur son état misérable, j’ai placé en toi la plus grande partie de mon espoir ; car si jamais le peuple de Mars devait lever les yeux sur son propre honneur, il me semble que la gloire ne pourrait en échoir qu’à ton temps.

Les antiques murs que le monde craint et aime encore, et au souvenir desquels il tremble quand il se rappelle le temps passé et se rejette en arrière ; les tombeaux où furent enfermés les ossements de tant de gens qui ne seront point sans renommée tant que l’univers ne tombera point en dissolution, et tout ce qui est enveloppé dans une même ruine, espère guérir par toi de tous ses vices. Ô grands Scipions, ô fidèle Brutus, combien elle a dû vous plaire, si elle vous est arrivée là-bas, la rumeur de cette mission si bien placée ! Comme je crois que Fabricius a dû être joyeux en apprenant la nouvelle, et comme il a dû dire : Ma Rome sera belle encore.

Et si on a souci dans le ciel de quelque chose d’ici-bas, les âmes qui habitent là haut et ont laissé leur corps à la terre, te prient de mettre fin aux longues discordes civiles qui enlèvent toute sécurité aux citoyens, et qui font que leurs sépultures, jadis si honorées, sont aujourd’hui, par suite de la guerre, abandonnées comme des sépultures de voleurs, tellement que les bons en sont seuls exclus, et que, parmi les autels et parmi les statues dépouillées, on se livre aux plus cruelles entreprises. Oh ! que d’actes