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Et je vis le Temps emporter comme une proie une telle quantité de vos noms, qui je les tins pour nuls, bien que la foule ne sache pas cela et ne le croie pas,

La foule aveugle, jouet du vent, qui se repaît d’opinions fausses, estimant que mieux vaut mourir vieux qu’au berceau.

Combien déjà sont morts heureux au maillot ! Combien sont morts misérables dans l’extrême vieillesse ! D’aucuns disent : heureux qui ne naît point.

Mais en admettant que, pour la foule habituée aux grandes erreurs, le nom soit plus éclatant après une longue existence, qu’est-ce que cette renommée qu’on prise tant ?

Autant en détruit et en emporte le Temps avare. On appelle cela de la renommée, et c’est une seconde mort contre laquelle il n’y a pas plus de remède que contre la première.

Ainsi le Temps triomphe des noms et de l’univers.