Page:Petrarque - Les Rimes de.djvu/324

Cette page a été validée par deux contributeurs.

mère, et qu’aucune précaution ne put détourner. Puis je vis Crassus, Antoine, Ortensius, Galba, Calvus

Avec Pollion, qui eurent une telle audace, qu’ils armèrent leur langue contre Cicéron, cherchant à l’accabler sous des calomnies indignes.

Je vis Thucydide, qui sut bien distinguer les temps, les lieux et les belles choses qui s’y produisirent, et les endroits qui s’imbibèrent de sang.

Je vis Hérodote, père de l’histoire grecque ; ainsi que le noble géomètre, tout bariolé de triangles, de cercles et de carrés ;

Et celui qui à notre égard fut comme une pierre, Porphyre, qui remplit le carquois de la dialectique de sillogismes aiguisés,

Se servant de sophismes pour combattre la vérité ; et celui de Cos, qui fit une œuvre meilleure, si bien compris furent ses aphorismes.

Apollon et Esculape sont devant lui, si obscurcis, qu’à peine mon regard peut les distinguer, tellement il semble que le temps efface et recouvre les noms.

Celui qui le suit est de Pergame ; c’est de lui que vient l’art si déchu de nos jours. À son époque, cet art n’était pas encore avili, mais peu étendu et obscur ; il l’éclaira et l’agrandit ;

Je vis Anaxarque, intrépide et viril ; et Xénocrate plus solide qu’un roc et que nulle force ne put amener à commettre acte vil.

Je vis Archimède, qui se tenait le visage baissé, et Démocrite marchant tout pensif, qui de sa propre volonté se priva d’or et de lumière.

Je vis Hippicis, le vieillard qui fut assez hardi pour dire : je sais tout ; puis Archésilaüs certain de rien et doutant de toute chose.