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quels tortueux sentiers, et avec quel art ils étaient conduits à l’amoureux troupeau.

Pendant que je portais mes regards de tous côtés, pour voir si je n’en apercevrais aucun qui se soit illustré par ses écrits, soit dans l’antiquité, soit de nos jours,

Je vis celui qui n’aima qu’Eurydice et qui la suivit en Enfer, et, mourant pour elle, l’appela de sa langue déjà froide.

Je reconnus Alcée, si habile à parler de l’amour ; Pindare ; Anacréon qui avait abrité ses muses dans le seul port de l’Amour.

Je vis Virgile ; et il me sembla qu’il était entouré de compagnons à l’esprit élevé et subtil, de ceux que volontiers le monde a acclamés.

L’un était Ovide, et l’autre Tibulle ; cet autre était Properce, qui tous trois chantèrent ardemment l’amour ; un autre était Catulle.

Une jeune Grecque marchait de pair avec eux, qui chanta jadis avec les plus nobles poètes, et dont le style fut rare et beau.

Regardant ainsi de çà et de là, je vis sur une plage verte et fleurie des gens qui s’en allaient devisant d’amour.

Voici Dante et Béatrice ; voici Selvaggia ; voici Gino da Pistoia, Guitton d’Arezzo qui semble tout courroucé de n’être pas le premier.

Voici les deux Guido, jadis si estimés ; Onesto de Bologne ; et les Siciliens qui jadis étaient les premiers et sont ici les derniers ;

Sennuccio et Franceschin, dont le talent fut si humain, comme chacun sait ; puis venait une troupe de gens étrangers d’allure et de manières.